Ethique et politique

Positionnement du CERT

Le CERT a vu le jour peu après les attentats de 2015, entre 2016 et 2018. Durant cette période de gestation, la littérature touchant à la radicalisation et au terrorisme islamiste était déjà abondante, du moins pour les publications en langue anglaise. Elle portait toutefois la trace des traumatismes collectifs et du climat sociétal qui l’avaient suscitée : un mélange d’anxiété diffuse et de sentiments d’urgence qui influençaient aussi bien les décisions politiques que la recherche scientifique. Dans ce contexte culturel, l’idéal visé par les études et rapports d’expertise consista – et consiste d’ailleurs toujours, pour l’essentiel – à empêcher, ou au moins à tenter d’anticiper les attentats à venir. On vit alors se multiplier les travaux visant à développer des outils pour repérer les signes de radicalisation, pour mesurer celle-ci, dans le but (plus politique que scientifique) de mettre en place des protocoles de surveillance et de contrôle voire de mise au pas de la radicalisation violente.

Le CERT refusa de participer à cette logique de l’évaluation. Il n’adopta pas non plus les principes qui guident ces pratiques – principes de surveillance et de normalisation des comportements envisagés comme « déviants ».

L’expérience fondatrice du Centre de Pontourny (CPIC-37), trop tôt avortée, à partir de laquelle il put se développer, fonctionnait sur un registre clinique très éloigné des approches normatives issues des sciences du comportement. L’expérience clinique de Pontourny tenait compte d’un vide épistémique, à savoir que, parmi toutes les recherches sur la thématique de la radicalisation, s’inscrivant généralement dans les champs de la sociologie, de la psychologie sociale et comportementale, aucune ne mettait en œuvre le paradigme de la psychologie clinique d’orientation psychanalytique. C’est en cette faille que nous avons développé nos pratiques : l’originalité du CERT dans le champ des travaux sur le terrorisme tient précisément dans la prévalence de son approche clinique, au cas par cas, inspirée de la technique psychanalytique, articulée aux travaux d’autres disciplines des sciences humaines et sociales (sociologie, sciences politiques, linguistique, droit).